Monsanto dans le viseur ?

Le géant américain de la chimie et des OGM, Monsanto, ébranlé sur ses bases par un petit céréalier de Charente ? C’est possible. La première marche a en tout cas été franchie hier par Paul François, céréalier à Bernac, près de Ruffec, après lecture du délibéré du tribunal des affaires de Sécurité sociale d’Angoulême concernant son affaire. Explications.

L’intéressé cherchait à prouver que ses nombreuses pertes de connaissance brutales subies en 2004 et 2005 étaient liées à une intoxication par « gazage ». « Le 27 avril 2004, j’ai inhalé du monochlorobenzène mélangé à un pesticide en voulant nettoyer mon pulvérisateur à cultures », explique l’agriculteur. L’herbicide, depuis interdit en France, était le lasso, distribué par la firme Monsanto.

Comas, problèmes d’élocution, pertes de mémoire, le céréalier est baladé d’hôpitaux en hôpitaux. Il passera même plusieurs semaines à la Pitié Salpêtrière à Paris. On ne sait pas ce qui lui arrive. « Après mon inhalation, personne, dans les centres antipoison, ne m’a fait d’analyse d’urine et de sang », constate Paul François en soulevant une faute.

La MSA (Mutualité sociale agricole), elle, ne veut pas qualifier ses problèmes de maladie professionnelle. Elle veut que soit prouvé le lien entre l’inhalation toxique du désherbant et les troubles physiques postérieurs. Deux procédures judiciaires sont donc lancées. Une au tribunal des affaires de Sécurité sociale d’Angoulême contre l’AAEXA, qui représente la MSA, et une procédure en responsabilité contre Monsanto au tribunal de grande instance de Lyon.

Expertise médicale.

Hier, les juges du Tass ont donc donné raison à Paul François. « La rechute déclarée le 29 novembre 2004 pour M. François est directement liée à l’accident du travail dont il a été victime le 27 avril 2004. Elle doit être prise en charge au titre de la législation professionnelle », indique le délibéré. L’AAEXA est condamnée à verser au céréalier 1 000 euros. La MSA a un mois pour faire appel.

C’est le professeur Jean-François Narbonne, toxicologue à l’université Bordeaux 1, qui a établi le lien entre les pertes de connaissance et le désherbant. « C’est grâce à lui, aux autres spécialistes et à Henri Pézerat, qui m’a mis en contact avec les bonnes personnes, que j’ai remporté une première bataille », insiste Paul François, qui va mieux. Mais une seconde bataille l’attend, plus rude celle-là puisque l’agriculteur se retourne contre Monsanto pour demander des dommages et interets.

Source : Journal Sud-Ouest, Le 4 novembre 2008