Le Paraguay en moins de dix ans est devenu un exportateur majeur de produits agricoles, et le 4eme pays producteur de soja transgénique, derrière ses voisins le Brésil et l’Argentine. La production de soja a été multipliée par trois en huit ans et compte aujourd’hui pour plus de 10% du PIB Paraguayen.

Le modèle agricole paraguayen est basé sur une agriculture intensive ayant massivement recours aux substances chimiques avec une organisation de type latifundière, ces exploitations d’Amérique Latine s’étendant sur des milliers d’hectares etcouvertes de soja Roundup Ready de Monsanto dans leur majorité.

En 2008, la surface de soja transgénique couvrait 2.6 millions d’hectares au Paraguay et ces champs de soja ont été aspergés de plus de 24 millions de litres de produits agrochimiques, dont le désherbant Roundup de Monsanto, indissociable des cultures OGM. La consommation paraguayenne de produits agrochimiques est devenue tellement abusive que la FAO classe le Paraguay dans sa liste des « pays préoccupants » depuis 2003. Au total en 2007, ce sont 736 000 tonnes d’engrais, 8 millions de litres d’herbicides, 1,7 millions de litres de fongicides et 2,45 millions de litres d’insecticides qui se sont répandus dans les campagnes paraguayennes.

De plus, les exploitants agricoles paraguayens continuent d’utiliser des pesticides connus pour leur toxicité aigue et interdits dans de nombreux pays, tels que le paraquat interdit dans l’Union Européenne car suspecté de favoriser la dégénérescence du système nerveux et provoquer la maladie de Parkinson.

Une étude scientifique démontre l’implication des pesticides dans les cas de malformations.

En 2007, les services de santé du Paraguay ont enregistré 307 cas d’intoxications graves liées aux pesticides mais les experts du Ministère de la Santé (« Vigilancia de Salud ») estiment que le chiffre devrait être multiplié par cinq car ces empoisonnements sont souvent mal diagnostiquées et confondues avec des intoxications alimentaires.

A l’occasion de la « journée sans pesticides » (« Dia de no uso de plaguicidas ») qui s’est tenue le 3 décembre 2008 à Asuncion, un groupe d’ONG a invité des médecins et des chercheurs à venir s’exprimer sur les problèmes de santé publique liés aux pesticides, et ce en présence de la Ministre de la Santé. Cette conférence a permis la présentation d’une nouvelle étude scientifique nommée « Malformations congénitales et agrotoxiques » réalisée par les docteurs Elena Benitez, Maria Luisa Macchi et Marta Acosta. Pendant un an, ces médecins ont étudié les cas de 52 nouveaux nés avec malformations et 87 bébés nés sains dans l’hôpital rural de Encarnacion. Le rapport expose les conclusions suivantes : « de l’analyse des données et des entretiens de comparaison entre les nouveaux nés sains et ceux atteints de malformations congénitales, les associations suivantes sont signifiantes : si le logement de la famille était situé à un kilomètre ou moins de champs fumigés, les bébés avaient deux fois plus de risque d’avoir des malformations. S’il y avait eu un contact direct ou accidentel entre la mère enceinte et des pesticides, le risque était multiplié par trois. Si des pesticides étaient stockés dans le foyer le risque est augmenté par quinze. S’il y avait des antécédents de malformations dans la famille, le risque était six fois plus accentué par les pesticides. » Pour leur étude, les scientifiques ont volontairement exclu les avortements spontanés ainsi que les morts nés, même si la cause en était une malformation invivable.

Les médecins ont aussi dénoncé les pressions dont ils ont été victimes au moment de rendre leur enquête de la part des « sojeros », les grands exploitants de soja. « Nous ne pensions pas qu’ils allaient réagir si violemment, ils ont été jusqu’à faire vérifier la validité scientifique de notre étude par la faculté de médecine » a commenté Benitez. Quant a la Ministre de la Santé, elle a reconnu qu’il était temps d’établir des normes pour réguler ce thème, « cela pourrait prendre la forme d’un décret puis d’une loi, nous devons nous en occuper et arrêter de simplement s’en préoccuper. »

Benjamin Sourice, Combat Monsanto

Source :

Malformaciones congénitas asociadas a agrotóxicos Congenital Malformations Associated with Toxic Agricultural Chemicals
Etude des docteurs Benítez-Leite, Macchi, Acosta.
Paraguay,2008