Une nouvelle étude scientifique montre que les produits pesticides commercialisés sont des centaines de fois plus toxiques pour des cellules humaines que leur matière active seule !

Depuis la seconde guerre mondiale, une quantité gigantesque de produits de synthèse, surtout issus de la chimie du pétrole et des toxiques, a été utilisée en agriculture. Les effets secondaires néfastes des pesticides sur la santé et l’environnement ont toujours créé de vifs débats à travers le monde. L’autorisation de mise sur le marché de ces substances repose sur des tests à moyen ou long terme sur des animaux de laboratoire, réalisés essentiellement sur le "principe actif", composant chimique déclaré des formulations commercialisées, sachant que les formulations complètes ne sont jamais publiques ni testées à long terme.

"Malgré sa réputation de produit bénin, le Roundup est le plus toxique parmi les herbicides et insecticides testés" d’après la nouvelle étude !

Les produits pesticides formulés mal évalués. Cette nouvelle étude [1], réalisée par une équipe conduite par Robin Mesnage et Gilles Eric Séralini, de l’Université de Caen, éclaire d’une manière éclatante les grandes insuffisances de l’évaluation des risques posés par les pesticides. En effet, on savait que les pesticides en formulation -tels qu’ils sont vendus et utilisés par les agriculteurs ou jardiniers, c’est-à-dire composés d’une substance active plus différents adjuvants – ne sont pas évalués pour leurs effets à long terme. Ceci a été confirmé par le Directeur de l’ANSES en 2012 [2] qui demandait des recherches sur les effets à long terme des pesticides en formulation.

Des effets jusqu’à 1000 fois plus importants. On comprend aujourd’hui en lisant cette étude combien on sous-estime la toxicité réelle des pesticides en formulation. En effet, les scientifiques ont montré que sur les 9 pesticides formulés, dont le Roundup de Monsanto, [3] étudiés (3 herbicides, 3 fongicides et 3 insecticides), 8 d’entre eux montrent clairement des effets toxiques sur des cellules humaines en moyenne des centaines de fois [4] plus importants que ceux causés par leur matière active. Le seul pesticide des 9 à faire exception à cette règle est un pesticide à base d’isoproturon… mais qui selon les auteurs n’a pas d’adjuvant déclaré.

Une DJA inadaptée. Cette étude remet en cause le mode de calcul des doses journalières admissibles (DJA) calculées aujourd’hui à partir de la toxicité de la substance active seule, ainsi que la procédure d’évaluation du risque actuelle des pesticides qui ne prévoit pas l’obligation de tests pour la toxicité chronique des pesticides en formulation. Les adjuvants employés dans les formulations de pesticides ne peuvent également pas être considérés comme des composants inertes mais ont souvent une toxicité propre et accroissent celle des matières actives !

« Cette étude montre l’ampleur du scandale de la sous- évaluation des risques réels posés par les pesticides auxquelles les agriculteurs et le reste de la société également sont exposés chaque jour ! » déclare François Veillerette, porte-parole de Générations Futures. « Nous demandons que des tests sur les effets chroniques de ces formulations de pesticides soient rendus obligatoires au niveau national et européen au plus vite, c’est une exigence de santé publique ! » ajoute t’il.

Pour Générations Futures cette étude montre les grandes insuffisances de l’évaluation qui ne prend en compte que les effets de la substance active – seule – pour la toxicité chronique. GF demande des tests de toxicité chronique systématiques pour les formulations complètes de produits pesticides commercialités.


Résumé scientifique de l’étude traduit en français par les auteurs
Des pesticides majeurs sont plus toxiques sur des cellules humaines que leurs principes actifs déclarés (Biomedical Research International, 2014, DOI 10.1155/2014/179691)R. Mesnage, N. Defarge, J. Spiroux de Vendômois et G.E. Séralini

A travers le monde, les pesticides sont utilisés comme des mélanges de plusieurs substances chimiques appelés formulations. Ils contiennent des adjuvants, qui sont souvent classés confidentiels et inertes par les fabricants, et un principe actif déclaré qui est habituellement testé seul. Ceci est vrai même dans les tests toxicologiques réglementaires les plus longs sur mammifères.

Nous avons testé la toxicité de 9 pesticides en comparant les principes actifs et leurs formulations sur 3 types de cellules humaines (HepG2, HEK293 et JEG3). Nous avons mesuré les activités mitochondriales, les dégradations membranaires, et les activités caspases 3/7. Nous avons étudié le glyphosate, l’isoproturon, le fluroxypyr, le primicarbe, l’imidaclopride, l’acétamipride, le tébuconazole, l’époxiconazole et le prochloraz qui constituent respectivement les principes actifs de 3 herbicides majeurs, 3 insecticides et 3 fongicides.

Les fongicides furent les plus toxiques à partir de dilutions de 300 à 600 fois des produits agricoles, puis les herbicides, et les insecticides, avec des profils de toxicité très similaires dans tous les types cellulaires. Les cellules placentaires humaines JEG3 sont les plus sensibles.

Malgré sa réputation de produit bénin, le Roundup est le plus toxique parmi les herbicides et insecticides testés. Surtout 8 formulations sur 9 se sont montrées en moyenne des centaines de fois plus toxiques que leur principe actif.

Nos résultats remettent en cause les calculs de la Dose Journalière Admissible pour les pesticides car cette norme est calculée sur la toxicité du principe actif seul. L’étude des effets combinatoires de plusieurs principes actifs ensemble peut être d’une importance secondaire si la toxicité des combinaisons des principes actifs avec leurs adjuvants est négligée ou méconnue.

Enfin, les tests réglementaires chroniques des pesticides peuvent ne pas refléter des expositions environnementales si seul l’un des ingrédients des formulations est testé.

Pour plus d’information : http://www.criigen.org





[1Major pesticides are more toxic to human cells than their declared active principles. Mesnage R, Defarge N, Spiroux de Vendômois J, Séralini G.E. BioMed Research International ,2014 (in press). http://www.hindawi.com/journals/bmri/aip/179691/

[2Cf. Avis de l’ANSES sur l’étude de GE Séralini de 2012.

[3à base des matières actives : glyphosate, isoproturon, fluroxypyr, pirimicarb, imidaclopride, acétamipride, tébuconazole, epoxyconazole, prochloraz

[4de 2 / 3 fois plus toxique pour le pesticide à base de pirimicarb jusqu’à 1056 fois plus toxique pour celui à base de tebuconazole